Le harcèlement scolaire, une affaire d’éducation ?
J’ai assisté le 15 mars dernier à la conférence sur « le harcèlement scolaire & le cyber-harcèlement » organisée par le département des Yvelines.
Durant 1h30, nous avons exploré au travers d’un programme conciliant théorie et expériences poignantes du terrain différents axes et points de vue de ce vaste sujet.
Avant de vous partager mon impression « de maman » sur le sujet, je partage avec vous quelques fondamentaux.
Qu’est-ce que le harcèlement scolaire ?
Des insultes, humiliations, mises à l’écart, rumeurs, coups infligés de façons répétées sur une longue période de la part d’un ou plusieurs élèves.
En chiffres, comment ces faits se traduisent au niveau national ?
Effarants, alarmants, impossible, ces chiffres sont criants :
- 1 enfant sur 10 est concerné, dont 1 sur 16 victime très sévère, soit 700 600 élèves français victimes de harcèlement dont 383 830 élèves sont des victimes très sévères,
- 12% des écoliers (CE2, CM1, CM2) souffrent de harcèlement, soit 295 600 élèves sur 2 463 065. Et 5 % des élèves subissent un harcèlement sévère, soit 123 000 écoliers de cycle 3*,
- 10% des collégiens subissent un harcèlement, soit 332 000 élèves sur 3 332 000 collégiens. Et 7% des collégiens sont confrontés à un harcèlement sévère, soit 233 000 élèves**,
- 3,4% des lycéens souffrent de harcèlement, soit 73 000 lycéens sur 2 140 900. Et 1,3% des lycéens de harcèlement sévère, soit 27 830 lycéens,
- 85% des actes se font en groupe,
- 22% des enfants harcelés n’en parlent pas,
- 61% des harcelés disent avoir des envies suicidaires.
*Enquête réalisée par l’Unicef et l’Observatoire
**Enquêtes de la Depp 2011, 2013
Avec des mots, cela pourrait donner quoi ?
Les premiers actes les interpellent, les surprennent. Au début ils croient à des blagues, essayent de riposter, luttent fortement et fermement, et à un moment l’écho se fait de plus en plus lourd, de plus en plus bruyant, ils sont là tous à le crier fort ce mot, ce surnom, cette phrase, qui fera de notre enfant un paria de son école.
Au début, il va essayer d’associer ces actes à l’école, essayer d’oublier en rentrant chez lui et puis il allume son ordinateur et les revoilà, il se referme sur lui, se dé-sociabilise, mais nous n’y voyons pas grand-chose (oh mais c’est la préadolescence, l’adolescence), cela s’accélère par des angoisses, de crises d’angoisses qu’il vivra au quotidien, il inventera diverses raisons pour ne pas aller à l’école mais nous l’obligerons à y retourner, la dépression finira par gagner du terrain, il maigrit, se renferme encore et encore, le décrochage scolaire n’est pas loin ou pire, les pensées suicidaires voir le passage à l’acte.
Tel est le vécu de plusieurs écoliers, collégiens et lycéens qui luttent, souffrent et parfois payent le prix fort pour que leurs voix soient entendues et que de nouvelles victimes n’existent plus.
Je pense tout particulièrement à Marion Fraisse – 13 ans : insultée, menacée à son collège jusqu’à se donner la mort il y a 3 ans.
Parmi les orateurs de cette conférence des témoignages remarquables de :
– Nora Fraisse, auteur du livre « Marion, 13 ans pour toujours » et du guide « Stop au harcèlement » présidente de l’association Marion la Main Tendue
– Noémya Grohan, auteur du livre « De la rage dans mon cartable » et présidente de l’association Génér’action Solidaire
Qu’est ce qui a changé depuis 2015 ?
Depuis 2011, le gouvernement a amplifié son engagement sur ces sujets.
L’année 2015 a été une année charnière puisqu’elle a vu naître les actions qui ont fait faire un grand pas à ce sujet :
- 30 20, création d’un numéro court et gratuit dédié au « non au harcèlement »
- Formation amplifiée auprès des élèves et des enseignants
- 1500 formateurs pour sensibiliser 300 000 personnes
- 80 situations et 88 familles ont été vues
- 05 novembre : journée nationale de mobilisation contre le harcèlement
- Plus d’informations : http://www.nonauharcelement.education.gouv.fr
- Rubrique Que faire
- Rubriques ressources pour comprendre, se sensibiliser et se préparer au sujet
Quelles seraient les solutions ?
De toute évidence elles sont plurielles et beaucoup seraient encore à venir !
Plus que des solutions cette conférence a pointé des axes d’éducation, des réflexes à reprendre au quotidien que l’on soit petit ou grand pour intégrer cette problématique dans son vrai cadre qu’est l’éduction.
Monsieur Dominique Nguyen Duc Long, Proviseur du Lycée Jacques Prévert de Longjumeau et chef d’établissement responsable FOQUALE a dit : Dans mon établissement de 1500 élèves j’ai mis en place la tolérance 0 pour le harcèlement, la moindre chamaillerie aussi bénigne soit-elle n’est pas autorisée. »
Ma compréhension des dires de ces conférenciers est que la solution est en nous !
Elle serait avant tout liée à notre définition de : châtier gentiment, brimer quelqu’un, se moquer, insulter, etc.
Elle est également liée à notre seuil de tolérance et d’usage de tel ou tel élément, plus nous les tolérerons, plus nous les appliquerons, plus nous en donnerons l’exemple, plus ils seront répliqués par nos enfants et ainsi de suite…
Il s’agit pas non plus d’être binaire, la solution n’est jamais 0 ou 1 mais plutôt le juste équilibre entre les deux, sensibiliser nos enfants au sujet tout en les laissant rire de ce dont nous pouvons rire.
Concrètement, parmi les pistes évoquées, il y aurait entre-autres :
- Ecouter est sans doute l’action la plus indiquée durant cette conférence. Savoir écouter son enfant sans juger pour expliquer ou comprendre, engager des discussions pour pouvoir potentiellement résoudre des situations complexes.
- Alerter le corps enseignant de l’établissement.
- Solliciter des RDVs avec les parties prenantes pour comprendre et agir.
- Alerter les référents départementaux.
- Se prémunir sur le site de l’Education Nationale http://www.nonauharcelement.education.gouv.fr
Des jeunes Lyonnais ont créé l’application « Kids-Ok » visant à nous alerter du traitement fait à nos enfants sur les réseaux sociaux.
Portant la réflexion plus loin, un principe a été évoqué ce soir-là : la Coéducation, Kézako ?
Reposant sur un trigramme où l’enfant est au centre avec les parents et les enseignants, elle est définie comme suit sur le site climat scolaire : la coéducation est une forme d’éducation qui privilégie l’apprentissage en autonomie, par l’expérience collective et la collaboration.
Le principe de coéducation met l’accent sur le rôle de chacun de ceux qui entourent un enfant dans le processus éducatif (parents, enseignants…). La coéducation est un processus interactif et collectif qui favorise la socialisation de l’enfant » (extrait du lexique du site universcience.fr).
A méditer, le lien social entre ces parties et de plus en plus étroit, nous ne pouvons plus les dissocier et nous savons que face à un enfant, nous devons parler d’une seule et même voix pour espérer qu’il trouvera le moins de difficultés possibles sur son chemin.
Nous reviendrons dans un prochain article sur la cyber-criminalité, sombre sujet également qui a malheureusement fait plus de dégâts qu’il n’en faut en France ou partout dans le monde.
Sanaà
Retrouvez également la Vidéo du collège Sidoisne, de l’académie d’Orléans-Tours… coup de cœur 2016 du jury académique pour le prix Non au harcèlement !sur le harcèlement :
https://fcpehouilles.com/2016/05/04/agir-face-au-harcelement-a-lecole/